Du Malawi au Mont Blanc
Avançons jusqu’en 2018 où, grâce à Suzette, Edson se tient sur la ligne de départ du 90 km Marathon du Mont Blanc : l’une des compétitions les plus prestigieuses au monde. Bien que les trails poussiéreux du mont Mulanje soient totalement différents des Alpes enneigées, Edson est dans son élément. Pour ce début dans l’ultra-marathon en Europe, il finit 20e : un résultat remarquable.
Après cela, Edson ne retourne pas en Afrique du Sud mais directement au Malawi. Même si ses jambes sont encore engourdies par ses efforts alpins, Edson ne peut pas attendre. Il veut absolument arriver à temps à Mulanje pour la Porter’s Race qui se tient quelques jours plus tard.
« Je voulais juste ressentir à nouveau l’émotion que j’avais ressentie lorsque ma mère m’avait emmené au mont Mulanje » explique Edson. « Elle ne m’a jamais vu courir avec dossard. J’avais participé à cette compétition à de nombreuses reprises, mais je voulais le faire de manière officielle pour la première fois. »
Presque 20 ans après que sa mère l’ait encouragé à courir sa première Porter’s Race, Edson court en tant que participant officiel. Il finit la course à la 14e place, mais le classement est sans importance.
« Je n’ai pas couru pour faire la compétition mais pour ressentir l’esprit de ma mère. Pour revivre sa joie la première fois que j’ai fini cette course. »
« Désormais, à chaque fois que je participe à une compétition, je ressens cette émotion. J’ai toujours le sourire aux lèvres sur mes photos en train de courir. Je dédie ce sourire à ma mère. C’est pourquoi quand je finis une course, je salue toujours les autres participants sur la ligne d’arrivée, tout comme elle m’a salué quand j’ai fini à l’âge de neuf ans alors qu’il n’y avait plus personne autour de nous. »
Aptitude spirituelle
Depuis, le « high five » de félicitation est devenu le geste symbolique d’Edson pour tous les coureurs qui finissent les compétitions de trail d’Afrique du Sud et de bien plus loin.
Il fait un retour nostalgique sur sa toute première compétition de trail officielle, le défi du Lion’s Head Challenge, et remporte la course. Il retourne à la Puffer Race et la gagne à nouveau, établissant un nouveau record par la même occasion.
Encouragé à relever de nouveaux défis, Edson retourne vivre au Malawi et se concentre sur son développement. Pour devenir un coureur intrépide, Edson a besoin d’un environnement d’entraînement où la peur n’existe pas.
« Vivre en Afrique du Sud affectait ma course. Sortir pour aller courir n’était pas toujours sûr » explique Edson.
« Quelqu’un m’a menacé avec un pistolet et m’a volé mon sac. Je suis retourné au Malawi où il y a peu d’argent mais où je vis en paix. »
« J’avais besoin de cette paix. Ma force est une aptitude spirituelle. Tout ce qui se passe dans ta tête affecte ton corps. Si tu crois à la faiblesse, alors ton corps suivra cette faiblesse. Si tu cours en altitude et que tu penses à la chute, tu peux tomber. Tout est dans le cœur et l’esprit. »
« Le plus important pour moi, c’est le bonheur. Quand je cours, je ne pense pas à la compétition. Je pense à la joie que je vais ressentir durant cette course. »
Outre la positivité, la simplicité fait partie des clés du succès d’Edson. Après avoir semé des cultures avant les mois pluvieux d’hiver, il se sent privilégié de pouvoir cultiver suffisamment de nourriture dans sa petite ferme pour se nourrir toute l’année. Une fois qu’il a travaillé à la ferme tous les matins, il est libre de partir courir sur les trails de Mulanje où il mesure ses sessions d’entraînement en heures plutôt qu’en distance. Il n’est pas rare qu’il s’entraîne pendant six heures.
En plus d’optimiser son entraînement, Edson dispose d’un réseau de contacts dans la course de trail qui lui proposent de nouveaux défis, comme par exemple une invitation à l’édition 2018 de l’ultra-marathon Al Marmoon se déroulant sur quatre jours à Dubaï, et couvrant 270 km dans les dunes du désert.
Un évènement qui ne ressemblait en rien à ce qu’a déjà vécu Edson : « À chaque foulée, le sol disparait sous tes pieds. »
Le dernier jour, le sable dans les chaussures d’Edson provoque tellement d’ampoules qu’il peut à peine marcher, et encore moins courir les 50 derniers kilomètres. Il accepte d’écouter les organisateurs qui le supplient d’abandonner que lorsqu’ils lui promettent de l’inviter à nouveau l’année prochaine. C’est la première fois qu’Edson ne termine pas une course qu’il a commencée.
« C’était ma première et dernière fois » déclare-t-il résolument. « Je ne suis pas du genre à abandonner. »
Le cœur chaud du Malawi
C’est cet état d’esprit, son sourire gagnant et sa vision inlassablement positive qui font d’Edson un membre si apprécié de la communauté de l’ultra-marathon. Tu ne peux t’empêcher d’aimer ce mec. Par son amabilité naturelle, un talent évident pour la course de grandes distances et une histoire qui mérite d’être racontée, Edson s’est fait des amis dans le monde entier. Et c’est ce réseau qui débloque le soutien financier dont il a besoin pour voyager de compétition en compétition et obtenir un dossard.
Avec le soutien de Marcus Smith, un ami de la famille On et fondateur de l’entreprise de performance Inner Fight, Edson a pu concourir dans la série de compétitions Ultra X. Il a remporté la deuxième place dans l’évènement du Sri Lanka en avril 2019. Il courra à nouveau bientôt sur cette série dans les déserts de Jordanie et à Chihuahua au Mexique, son premier voyage en Amérique.
C’est la gratitude d’Edson pour ces opportunités qui encourage les autres à l’aider. Lorsqu’il a fini le Marathon du Mont Blanc 2018, les organisateurs lui ont dit qu’il était « le participant ayant atteint la ligne d’arrivée le plus heureux de toute la compétition ». Même après avoir couru 90 km à travers les montagnes, il a pris soin de remercier les supporters sur la ligne d’arrivée.
« Ils nous attendaient depuis si longtemps pour pouvoir nous montrer qu’ils nous respectent et que nous ne sommes pas fous. C’est pourquoi je leur montre mon respect en partageant ma gratitude, mon expérience. C’est quelque chose de spirituel. C’est la communauté du trail. Elle est comme ma famille. »